Idriss
ABERKANE est né en 1986, spécialiste des neurosciences appliquées et titulaire
de trois doctorats. Editorialiste au « Point », il a également donné
plus de quatre cents conférences sur quatre continents.
Idriss
Aberkane, lui, nous rappelle sans cesse l’importance d’une expérimentation
libérée face aux certitudes établies et aux idéologies du passé. Il nous
explique que nous devons nous adapter à ce que nous découvrons chaque jour des
formidables possibilités humaines.
Les
neurosciences questionnent aujourd’hui nos habitudes et nos façons de penser
mieux que toute autre discipline. Il nous explique que notre cerveau sera
toujours plus grand que tout ce qu’il peut concevoir. Nous n’utilisons pas bien
notre cerveau, à l’école, au travail, en politique.
Les
conséquences de ce mauvais usage sont diverses, mais elles ont en commun le
mal-être, fossilisation mentale et l’inefficacité. Nous pouvons mieux
apprendre, mieux produire, mieux voter, nous pouvons mieux penser, mieux
communiquer, tout cela en étant plus épanouis, plus heureux, plus productifs,
et donc plus brillants. Alors que signifie exactement sortir son cerveau du
confinement ?
Il
est tout d’abord important de souligner que le prodige ne pratique pas parce
qu’on le lui demande, mais parce qu’il adore ça. Léonard de Vinci affirmait que
l’amour est la source de toute connaissance. Le prodige, en effet, travaille
par amour. Il ne travaille pas pour une
note, pour un prix, ou pour une reconnaissance de ses pairs, il le fait pour
lui, par désir inconditionnel de ce qu’il produit.
L’école actuelle a
remplacé notre cœur et notre intuition dans la définition de notre destin, de
notre identité, et nous n’avons pas gagné au change. Dans la vie, l’humanité
crée une diversité de pensées, de pratiques, de méthodes, d’esprit. Dans la
vraie vie, l’école dit : « Hors de ma mesure, point de salut. »
Pourtant face à l’échec scolaire, cette même école admet que la priorité, c’est
au moins la sociabilisation de l’élève. Elle se produit donc uniquement dans la
cour de récréation. Notre société est une sorte de machine qui prône la culture
de la place fixe et qui est à la fois une culture de la conformité mais aussi
de l’exclusion. Il est actuellement inscrit dans le cahier des charges de
l’école qu’elle doit décevoir des usagers et, par principe, décevoir l’Homme
plutôt que l’Usine qui est son client final. Il faut donc créer à l’échelle
mondiale la méthode « essai-erreur » et expérimenter de nouvelles
pratiques pédagogiques autour, notamment, de ce que le psychologue Stanislas
Dehaene a appelé « les quatre piliers de l’apprentissage » :
-
L’attention
-
L’engagement
actif
-
Le retour
d’information
-
La consolidation
Dans
les écoles Montessori nous proposons aux enfants des activités en adéquation à
leur besoin. En allant du plus simple au plus complexe tout en alliant
mouvement et répétition. La leçon en trois temps (présentation, retour
d’information, consolidation) permet d’asseoir l’expérience. De nombreuses
écoles alternatives ont compris l’importance de changer notre façon d’éduquer
par la créativité, par l’amour des savoirs, par l’épanouissement et non par la
conformité. Pourquoi
éduquons-nous ? Pour le bonheur intérieur brut ou pour le produit
intérieur brut ? L’école désirée est celle de l’épanouissement,
l’école imposée est celle de l’unité économique. A partir du moment où ce n’est
plus à l’école de s’adapter à l’homme mais à l’homme de s’adapter à l’école, le
ver est dans le fruit !
Nous vivons donc dans le
conditionnement. Ce qui est sûr, c’est qu’à l’école,
échanger des savoirs, c’est tricher, alors que dans la vraie vie, cela
s’appelle de la coopération. L’école prépare à la société, et si elle a des
vices, ils s’y trouveront amplifiés. L’individualisme, la conformité,
l’apprentissage monocanal… Tous ces vices scolaires se retrouveront en société,
mais le plus grave d’entre eux c’est l’idée que le plaisir est
anti-professionnel. L’idée est donc enfouie dans notre inconscient collectif
que le travail est une conformité forcée et qu’il sera douloureux. Or rien n’est plus faux : travailler
dur pour quelque chose que l’on aime, cela s’appelle de la passion.
Il
faut rendre nos enfants gourmands de savoirs ! Cela tombe bien ils le sont
naturellement dès la naissance. Il faut
donc s’intéresser à la dynamique d’apprentissage et non au stock du savoir.
Ce
n’est pas au cerveau de servir l’école mais à l’école de servir le cerveau !
Stéphanie F.